On parle de trouvaille de génie : « Ce jour-là, Monsieur Labiche a fait mieux qu'écrire une pièce, il a créé un genre, et dans notre vaudeville contemporain, on n'a rien imaginé de mieux, d'une fantaisie plus folle ni plus large, ni d'un rire plus sain, ni plus franc », commentait Zola. Sur le point d'épouser la fille de Nonancourt, pépiniériste de son état, Fadinard, jeune rentier parisien, rentre chez lui hilare : son cheval vient de dévorer au bois de Boulogne un chapeau de paille d'Italie qu'une inconnue avait accroché à un arbre… Mais un officier, soupirant de la dame, vient exiger qu'on le remplace… S'ensuit une poursuite endiablée d'hommes entraînés par un courant irrésistible. Selon Labiche, « une pièce est une bête à mille pattes qui doit toujours être en route » ; et c'est un cortège de fantoches qui, apparaissant, disparaissant, reparaissant, serpentent à la poursuite du fatal chapeau. Par sa dimension chorégraphique, ses chansons, ses choeurs – pas moins de quinze comédiens sur scène – la pièce est un véritable musical-théâtral. Labiche, cinglant observateur du siècle, touche au fantastique et à l'absurde ; jamais on n'avait donné cette rapidité à l'intrigue, ce rythme à l'écriture théâtrale, cette vitesse au rire.