L'Annonce faite à Marie connaît un vif succès ; en mars, le père meurt ; une semaine plus tard, sa soeur Camille est internée. Claudel a 45 ans. Consul général en Allemagne, il revient à la traduction d'Eschyle – après Agamemnon, Les Choéphores, drame familial, drame du matricide – mais rêve sur le poème satyrique qui complétait la tétralogie et dont il ne reste que le titre : Protée. Prenant appui sur L'Odyssée et Hélène d'Euripide, il en fait une « énorme bouffonnerie, une véritable pitrerie de cirque ». La nymphe Brindosier et sa troupe de satyres, prisonniers du Dieu Protée dans l'île de Naxos, veulent profiter de l'arrivée de Ménélas et Hélène, retour de Troie, pour s'évader. Brindosier se fait passer auprès de Ménélas pour la véritable Hélène ; quant à celle-ci, elle la persuade de rester avec Protée à Naxos, moyennant quelques colifichets, récupération de naufrages, dont les caves de Protée sont pleines. Claudel n'était pas fâché de déchirer ainsi « l'auréole d'apôtre » que l'auteur de L'Annonce et de L'Otage disait « porter à l'occiput ». « Vous savez, écrivait-il à Barrault, le goût que j'ai toujours eu pour la farce que je considère comme la forme exaspérée du lyrisme et l'expression héroïque de la joie de vivre. »