Les débuts de Jean-Marie Serreau se situent du côté des auberges et des chantiers de jeunesse, des colonies de vacances à travers la France et l'Allemagne, avec le répertoire moliéresque.
Il participe à la création de « Travail et Culture » avec Maurice Delarue et Pierre-Aimé Touchard, en 1944. Fondée en 1949, la Compagnie Jean-Marie Serreau, après avoir donné George Dandin en tournée, crée L'Exception et la Règle de Brecht au théâtre des Noctambules ; n'oublions pas que c'est lui qui introduisit Brecht à la Comédie-Française avec Galileo Galilei comme il avait proposé Mère Courage à Vilar. De 1950 à 1954, il dirige le théâtre de Babylone, où il met en scène La Grande et la Petite Manœuvre d'Adamov (1950) et permet à Roger Blin de créer En attendant Godot de Beckett (janvier 1953). En 1954, il crée Amédée ou Comment s'en débarrasser d'Ionesco, qu'il reprendra maintes fois au cours de sa carrière : au théâtre de l'Alliance française, en 1957; à l'Odéon, en 1961 ; à la Gaîté-Montparnasse, en 1962 ; à l'Ambigu, en 1963 ; au théâtre de Poche, en 1969. Après avoir présenté Les Coréens de Michel Vinaver, en 1957, au théâtre de l'Alliance française, il crée Biedermann et les Incendiaires de Max Frisch au théâtre de Lutèce (1960) et consacre l'année suivante trois auteurs contemporains à l'Odéon : Beckett (En attendant Godot), Ionesco (Amédée ou Comment s'en débarrasser), Genet (Les Bonnes).
Alors qu'au début des années cinquante Serreau défend les petits théâtres de la rive gauche, il pratique, à la fin de ces mêmes années, l'ouverture vers le théâtre des autres cultures : en 1958, il découvre le dramaturge algérien Kateb Yacine avec Le Cadavre encerclé (en 1963, ce sera La Femme sauvage et, en 1967, Les Ancêtres redoublent de férocité) ; en 1964, il propose Aimé Césaire avec La Tragédie du roi Christophe et, en 1969, avec Une tempête. En juillet 1971, au festival d'Avignon, il met en scène Béatrice du Congo de l'auteur ivoirien Bernard Dadié, et sa dernière mise en scène est de Paol Keineg : Le Printemps des bonnets rouges. C'est alors qu'il travaille, après une période africaine, à l'aménagement d'une salle quasi parisienne, à la Cartoucherie de Vincennes. En quête d'espaces nouveaux - il avait mis en scène, en théâtre simultané, la pièce de Michel Parent, Gilda appelle Mae West, au festival des Nuits de Bourgogne, en 1962 -, Serreau comptait s'implanter en défendant un certain type de répertoire en prise directe sur le réel. Conjointement à des qualités certaines d'animateur – au sens où l'après-guerre l'entendait – il allie le goût de la découverte des textes à un vrai talent de comédien. La grande salle du Théâtre de la Tempête, dont il fut le fondateur, porte aujourd'hui son nom.
• A. PIERRON
BIBLIOGRAPHIE :
E. Auclaire-Tamaroff et Barthélemy, Jean-Marie Serreau découvreur de théâtres, l'Arbre verdoyant éd., 1986.
Au cours d'un entretien, Aimé Césaire évoque le travail théâtral de Jean-Marie Serreau et leur collaboration, en particulier pour la mise en scène de La Tragédie du roi Christophe (1965), avec Douta Seck dans le rôle titre, avec des extraits et des photos du spectacle. Puis, entretien de Jean-Marie Serreau, avec des images de répétions de Une Tempête, à Hammamet (Tunisie).